De très fortes perturbations, des centaines de personnes descendues, en pleine nuit, sur les voies… et 50 000 voyageurs, principalement des usagers des RER de la région parisienne, qui ont subi de très importants retards : c’était le 7 novembre dernier, la soirée catastrophe sur le RER B. Catastrophe qui pourrait se reproduire dénoncent l’ensemble des syndicats tant de la SNCF que de la RATP qui y voient un révélateur, « élément déclencheur du ras-le-bol quotidien. On ne veut pas que les 7 novembre se renouvellent… » Cette ligne B a une particularité : sa coexploitation de façon presque équivalente par la SNCF et la RATP. Aujourd’hui, tant du côté des directions que des syndicats, après des décennies de bisbilles, on veut faire cause commune. Et c’est tous ensemble, le 23 novembre, que les syndicats – CGT, UNSA, SUD, CFDT, FO – de la RATP et de la SNCF ont déposé une alarme sociale. Avec la volonté de dire que « trop c’est trop », arguant qu’on a atteint « un point de rupture » alors que cette ligne a été en pleine actualité ces derniers mois et va l’être tout au long de l’année à venir.
La régularité se situe, mi-2012, à 83,5 %, soit très en deçà des objectifs fixés par le Stif à 94 %, alors que le taux de satisfaction ne dépasse pas 50 % sur la partie nord. Ils ne croient pas que le projet d’organisation commune RATP-SNCF dédiée à l’exploitation de la ligne puisse être le remède miracle. Or, les deux entreprises se sont engagées en faveur d’un commandement unifié du RER B. Afin de répondre, comme elles l’ont précisé dans un communiqué commun, aux attentes convergentes des voyageurs, du Stif, des pouvoirs publics et du Parlement,
« telles qu’elles ressortent notamment des travaux de la commission d’enquête sur le RER, présidée par Daniel Goldberg ». Pour les présidents de la SNCF et de la RATP, cette démarche doit conduire « à une nette amélioration de la ponctualité et de l’information des voyageurs sur l’ensemble de la ligne, avec de premiers résultats concrets attendus dès 2013. » La mise en place de ce centre de commandement unique avait fait l’objet d’un premier bras de fer. Les syndicats ont obtenu, en septembre, l’abandon du projet de structure juridique commune de style GIE (groupement d’intérêt économique) ou GIP (groupement d’intérêt public) pour la gestion de la ligne. Reste donc une organisation de type direction de ligne unifiée, avec un directeur venant à tour de rôle de l’une des deux entreprises. La création de cette direction de ligne unifiée est attendue en avril.
Si les syndicats voient là « un simple élément d’affichage », c’est qu’ils se réfèrent à un précédent : la mise en place de l’interopérabilité, avec suppression en 2009 du changement de conducteur RATP/SNCF gare du Nord. Présentée comme une solution de bon sens avec une efficacité sur l’ensemble du système, elle n’a, déplorent-ils en se référant à l’évolution négative de la régularité, pas amélioré la situation. Des réductions d’effectifs à la conduite ont permis de gagner en productivité mais pas en régularité. Et puis, ils notent que cette interopérabilité n’a pas d’efficacité en cas de situation très perturbée. Certains estiment que la fin de la relève des conducteurs a ôté une sorte de « soupape » gare du Nord et « aggraverait » même la situation dans ces cas-là. Et de souligner que, « si les retards dépassent 5 mn, le centre unique devra repasser aux mains des “pilotes traditionnels”, RFF et SNCF d’un côté, RATP de l’autre ». Pour ces syndicalistes, le message est clair : « on ne peut, une nouvelle fois, décevoir les usagers, les élus, en les faisant rêver. Il ne suffit pas de travailler l’organisation pour que tout aille mieux. On prend le problème à l’envers, il est nécessaire d’abord de mettre les moyens. Or ils n’y sont pas. » À l’appui, ils rappellent les 35 % de hausse du trafic en dix ans alors que, dans le même temps, les effectifs ont été réduits, d’où « un sous- effectif permanent. » Afin d’y « voir clair », ils évoquent « l’urgence » du schéma directeur de la ligne B. Et présentent, dans cette perspective, de « réelles revendications » de nature à améliorer la régularité, en voici l’essentiel :
• des effectifs d’agents de conduite « en adéquation » avec la charge de travail et des réserves aux terminus pour permettre de récupérer le temps perdu en ligne lors des retournements ; • la mise en place de rames de réserve avec du personnel de conduite dans des « endroits stratégiques » ; • la création d’un atelier d’entretien du matériel au nord de la ligne à Mitry ; • la « réhumanisation » des gares et des trains ; • l’augmentation des moyens humains et matériels pour l’entretien des infrastructures ; • sans attendre, des travaux sur les infrastructures au sud afin de pouvoir faire rouler des rames à deux étages ; • à une échéance plus lointaine, car c’est « très lourd », l’engagement d’investissements financiers pour le doublement du tunnel Châtelet/gare du Nord. Là où passent, au quotidien, 1,5 million de voyageurs, dont 600 000 pour la D.
Le 5 décembre, lors d’une audition de Guillaume Pepy par le Stif, les élus sont eux aussi revenus sur l’ampleur de l’incident du 7 novembre et l’ont interpellé sur les mesures à prendre « pour que les conséquences en cascade d’un incident technique ne puissent plus générer un tel désordre pour les voyageurs ». Le conseil du Stif devait organiser, dans les prochains jours, un retour d’expérience avec les voyageurs.
Tout en rappelant « l’urgence » de la mise en place du centre de commandement unifié, les élus ont aussi insisté pour que les schémas directeurs des RER et le plan de mobilisation soient réalisés « dans les temps, conformément aux engagements initiaux des entreprises », et que la SNCF reste « mobilisée sur la réalisation du vaste programme de rénovation et renouvellement des trains et RER engagé depuis 2006 ». Le schéma directeur de la ligne B fait figure de prochaine échéance majeure. Au moment où devrait être mis en place le centre de commandement unifié.
RER D. Une mise en œuvre progressive
Le schéma directeur du RER D prévoit la mise en service conjointe, fin 2013, de plusieurs aménagements d’infrastructure améliorant la fiabilité de la ligne et une nouvelle gare Pompadour, remplaçant l’actuelle gare Villeneuve-Prairie. Ils s’accompagnent d’une nouvelle grille de dessertes qui participe à l’amélioration de la régularité mais se traduit aussi par des allongements de temps de parcours sur les trajets depuis la Grande couronne. Lors d’une réunion fin novembre, en présence des élus concernés, il a été demandé à RFF et à la SNCF d’étudier une mise en œuvre progressive de cette nouvelle desserte pour mesurer concrètement les gains de régularité.