La construction des lignes souterraines du métro parisien a été confrontée à l’existence dans le sous-sol d’autres réseaux techniques (conduites d’eau et de gaz, égouts, etc.), comme à des excavations artificielles, les carrières de la capitale partiellement converties en catacombes. Spécialiste de l’histoire souterraine de Paris, Gilles Thomas évoque comment il a fallu concilier techniquement métro et carrières. Occasion de découvrir les étroits liens entre la RATP et l’Inspection générale des carrières.
Des lignes avec des numéros… changeants
La numérotation des lignes du métropolitain de Paris ne doit rien au hasard, reflétant tout simplement leur ordre d’ouverture. La première ligne ouverte, reliant Vincennes à Neuilly-sur-Seine, porte naturellement le numéro 1. La dernière est la 14, appelée « Meteor » au moment des travaux, pour Métro est ouest rapide, et l’on annonce déjà les lignes 15 à 18 du futur métro orbital dans le cadre du Grand Paris. Cette numérotation est susceptible de connaître des exceptions, comme cela se produit parfois à l’usage pour toute règle préétablie. Ainsi la jonction récente des lignes 13 (Saint-Lazare – Porte-de-Clichy/Porte-de-Saint-Ouen) et 14 (Invalides – Porte- de-Vanves) aboutissant à la ligne 13 que l’on connaît aujourd’hui. De la même manière, la seconde ligne ouverte porte aujourd’hui le numéro… 6. Il faut dire pour être exact et remettre les choses dans leur contexte qu’il avait été envisagé de créer à Paris ce qui existait à Londres, une circulaire qui aurait porté, et qui porta un temps le nom de ligne n° 2, décomposée en n° 2 sud et n° 2 nord.
Au temps de Fulgence Bienvenüe, le fameux obstacle du passage sous la Seine nécessita de congeler le terrain gorgé d’eau au niveau de la place Saint-Michel en utilisant de la saumure ; il explique également la jonction tardive, en 1977, entre les stations Luxembourg et Les Halles du RER B, l’ancienne ligne de Sceaux. Mais la construction du métro fut confrontée à une autre problématique qu’il fallut prendre en compte dès les premiers travaux de la deuxième ligne dans sa partie sud : l’existence des carrières souterraines.
Quand le métro doit cohabiter avec les carrières souterraines
Les travaux préparatoires à l’établissement de cette « circulaire sud » furent donc confrontés à l’existence d’anciennes carrières souterraines (déjà consolidées ou non) un problème inédit pour les entreprises soumissionnaires, mais qui allait se renouveler à plusieurs reprises par la suite ; citons principalement la ligne n° 4 dans sa traversée du XIVe arrondissement, ainsi que les lignes 5 et 7 au niveau de la place d’Italie. Mais on pourrait également évoquer la ligne 6 lors de son passage à Dugommier et Daumesnil (XIIe arrondissement), la rencontre par la ligne 7 des boulevards des Maréchaux sud, ou l’extension du métro ligne 8 entre les stations Liberté et Charenton-Écoles. Dans les cas particuliers du croisement du métro avec les galeries de servitude établies au niveau des anciennes carrières souterraines de la Ville de Paris (ligne 12 près de Montparnasse et ligne 13 au niveau de la porte de Vanves), la problématique était différente car il fallait s’arranger pour ne pas interrompre le cheminement possible dans le réseau souterrain de ce qui est officieusement connu sous le vocable usuel de « catacombes ». À Charenton-le-Pont, le métro est aussi quasi au niveau des carrières, ce qui entraîna une destruction de consolidations patrimoniales centenaires. Tandis que pour les lignes 12 et 13 actuelles, le métro croisant les galeries de servitude de l’Inspection à niveau, ceci obligea le service des Carrières à en créer de nouvelles afin d’assurer la continuité de son propre réseau, en faisant creuser des jonctions modernes au-dessus ou au-dessous du métro, celui-ci étant plus que fortement prioritaire dans le cas de ces rencontres entre réseaux différents.