Sept ans de réfections. Et après ? Engagé dans une ambitieuse rénovation du réseau depuis que le rapport de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) de 2005 a mis en évidence son état d’obsolescence, RFF s’apprête à s’appuyer sur le nouveau rapport de l’EPFL qu’il a commandé à Yves Putallaz et Panos Tzieropoulos pour analyser ce qu’il faudrait encore faire. Un rapport bien moins sévère que celui de la Cour des comptes, qui soulignait récemment la tendance à réaliser les travaux là où c’est le moins compliqué, c’est-à-dire sur les lignes les moins chargées. « La Cour des comptes a une vision sur la gouvernance tandis que l’EPFL a une vision plus technique », explique Alain Quinet, directeur général délégué de RFF.
Pour Yves Putallaz, le doublement de l’effort d’investissement mis en œuvre par RFF est « remarquable ». Il est passé à 1,7 milliard d’euros annuels entre 2006 et 2011. Il propose toutefois un bilan socio-économique sur les différentes parties du réseau, qui sont toutes maintenues sans distinction, même les moins fréquentées, « ce qui consomme des ressources d’entretien ». Cela permettrait à l’État de faire des arbitrages.
La référence, c’est toujours la Suisse, où les 2/3 des investissements vont au renouvellement du réseau et 1/3 à l’entretien. En 2003, c’était l’inverse en France. Aujourd’hui, la répartition des sommes se fait à égalité. « Faut-il faire plus ? La réponse que nous avons envie de donner est : non. Car nous n’avons pas plus d’argent et nous sommes arrivés à la limite de l’acceptabilité des travaux avec 1 000 grands chantiers par an. Donc, il s’agit de prolonger l’effort dans le temps. Nous allons vers une logique d’optimisation du réseau existant », explique Alain Quinet.
D’abord, en augmentant sa capacité. « Nous allons consulter les autorités organisatrices des transports sur leurs attentes puis mettre en cohérence les programmes lancés », précise-t-il. RFF souhaite aussi réaliser « de petits investissements stratégiques peu visibles avec de grands résultats », par exemple les IPCS (installations permanentes de contresens), des voies d’évitement pour les trains de fret longs ou des sauts-de-mouton. Il compte aussi sur des gains de productivité grâce à la commande centralisée. Au lieu de 1 500 postes d’aiguillage, il ne devrait plus y avoir que 16 grands centres de régulation du trafic, permettant de gagner en efficacité, notamment en zone dense où les exigences de robustesse et de régularité sont élevées.
« Avec l’ERTMS, on pourra aussi augmenter le nombre de sillons sur certaines lignes TGV saturées. Par exemple sur Paris – Lyon, limitée à 13 sillons par heure, on pourrait en gagner deux, voire trois », précise-t-il. « Nous avons 5 à 10 ans de visibilité. Le ministre nous a donné 2 milliards par an jusqu’à 2020-2022. Nous allons réévaluer les projets en cours. Dans cinq ou six mois, nous connaîtrons le tableau des entrées et des sorties de ces 2 milliards. » C’est à ce moment que RFF doit présenter son nouveau plan au ministre des Transports.
Auparavant, RFF devrait signer un nouveau contrat de performance avec l’État. Peut-être sous forme d’avenant au contrat actuel qui s’achève fin 2012, en attendant d’en savoir plus sur la réforme ferroviaire.
La caténaire : un sujet de préoccupation
Selon le nouveau rapport de l’EPFL, les caténaires pourraient « constituer le prochain point critique : les travaux prévisibles sont importants, consommateurs de plages de travaux sur des axes structurants chargés ». Ses auteurs estiment que 5 000 km de caténaires atteignent leur durée limite. « Soit la technologie ne correspond plus aux exigences d’interopérabilité et nécessite de l’entretien coûteux, soit l’âge des supports laisse présager un état moyen peu rassurant », écrivent-ils. Surtout sur les lignes en 1,5 kV continu, dont les supports ont pour l’essentiel 60 à 90 ans. On devrait connaître dans quelques mois la stratégie retenue par RFF et SNCF Infra. Mais leur rénovation nécessitera des moyens accrus à moyen terme. Les rapporteurs suggèrent d’associer les industriels qui travaillent sur des « innovations susceptibles de réduire les coûts de renouvellement ainsi que les impacts capacitaires (plages travaux) ».