TSO a modifié une locomotive V 211 pour la rendre « zéro émission », une première en France. Avec sa nouvelle motorisation, elle est l’outil idéal pour intervenir sur les chantiers en zones urbaines et souterraines.
Ce sont des sœurs jumelles, avec, comme toujours dans ce cas, la difficulté de les distinguer avec précision. Les deux locomotives V 211 de TSO répondent parfaitement à cette description. À l’origine, elles sont allemandes, construites au début des années 60 pour la DB qui les utilise comme engins de remorquage sur des trains de voyageurs ou de marchandises. Mais leur motorisation plus puissante que les modèles des premières séries leur permet également d’être attelées en tête de trains de travaux. À l’heure de leur réforme une quarantaine d’années plus tard, c’est cette aptitude qui sera mise en avant pour permettre à certaines d’entre elles de connaître une seconde vie. Des opérateurs privés en Allemagne tout comme à l’étranger s’en portent acquéreurs pour les placer en tête des lourds trains de chantier. C’est ainsi que TSO intègre deux V 211 à son parc, remotorisées et repeintes aux couleurs de l’entreprise ferroviaire. Elles sont remisées à Chelles quand elles ne sont pas en opérations. Ce matériel évolue sur de nombreux chantiers en Île-deFrance où une bonne partie du réseau se trouve en sou terrains, comme sur le RER C avec l’opération « Castor » ou encore sur la construction du prolongement du RER E. Jusqu’alors, les fumées d’échappement étaient filtrées par un wagon épurateur de gaz ajouté derrière la locomotive, une solution un peu lourde. TSO a donc décidé de modifier une des deux V 211 pour la doter d’une nouvelle motorisation plus en rapport avec ses missions. En collaboration avec Eneriat CAT (filiale du groupe Monnoyeur), la locomotive, renumérotée V 212.0397 (1), devient un engin bimode à traction diesel et électrique. Il y a d’abord un moteur thermique de 900 kW per mettant de tracter un lourd convoi de travaux jusqu’à 100 km/h pour se rendre sur une zone de chantier. Une fois sur place, deux moteurs électriques offrant une puissance combinée de 300 kW permettent des déplacements à faible allure sans rejets dans l’atmosphère. Une batterie embarquée de 210 kW permet d’effectuer une journée de travaux sans problème de recharge (qui s’effectue lors des marches en diesel).
De nouveaux écrans sont apparus en cabine comme cet afficheur de traction électrique. (Photos 20 mai 2021) © Ph.-E. Attal
Sur le papier, l’idée paraît assez simple et on se demande pourquoi elle n’est pas mise en œuvre plus tôt. En réalité, il faut quatre années de recherches et 2 millions d’euros d’investissements pour parvenir à mettre au point cette motorisation bimode. Engagée à titre expérimental sur différents chantiers en 2019 et 2020, la V 212 donne pleinement satis faction. Cette phase de tests per met de retenir des innovations supplémentaires qui seront développées sur un second prototype. Jusqu’alors seuls de petits engins disposent d’un moteur électrique et c’est la première fois en France qu’une locomotive d’une telle puissance en est dotée. Mine de rien, c’est un vrai progrès puisque au-delà de l’aspect environne mental, le niveau d’émission de gaz CO2, contrôlé en permanence dans les travaux en tunnels, oblige régulièrement à des arrêts du chantier pour améliorer la qua lité de l’air. Avec ce type d’engins appelés à se développer, ces contraintes disparaissent. Une bonne nouvelle pour des chantiers au calendrier toujours très contraint.
(1) La renumérotation de la V 211 en V 212 tient tout simplement à sa taille. Après modification, la V 211 était un peu plus longue, devenant de fait une 212.