Les quatre ABDe 8/8, alias 4000, de la compagnie privée du Montreux – Oberland – Bernois (MOB) ont connu une longue carrière (1968 à 2020) et peuvent être tenues pour de véritables icônes à part entière des chemins de fer suisses. Si la préservation d’un exemplaire s’avère problématique, la reproduction en modèle réduit des 4000 a connu un grand succès.
Les 4000 n’ont pas été achetées « sur étagère » mais ont été acquises au terme d’une procédure d’analyse assez poussée, menée durant les années 60. Le parc moteur du MOB est encore à cette époque essentiellement constitué d’automotrices particulièrement anciennes : ABDe 4/4 4 de 1903, ABFe 4/4 5 de 1903, ABDe 4/4 7-20 de 1904-1920, ADZe 4/4 23-26 de 1912, BDZe 4/4 27-28 de 1924 Nonobstant l’arrivée des CFe 4/4 3001-3004 et 3005-3006 en 1944-1946, cette flotte (à laquelle s’ajoutent les DZe 6/6 2001-2002 de 1932) n’est pas vraiment à même de faire face à l’augmentation des charges remorquées et plus encore, de satisfaire aux attentes en matière de confort des voyageurs. Le MOB envisage un moment d’acquérir des véhicules de type ABe 4/4 aptes à l’UM et semblables aux 41-49 de la Bernina. Mais la nature du trafic et la nécessité de pouvoir bénéficier d’un fourgon conduisent finalement au choix d’un véhicule double de type 8/8. Le MOB se tourne alors vers les constructeurs SIG, BBC et SAAS, alias Société anonyme des ateliers de Sécheron (Genève), dont le chef de la division Traction électrique n’était autre que Roger Kaller, le « père » des 4000. Ces dernières dérivent mécaniquement des ABDeh 8/8 (1965) du BVZ mais sont conçues pour être plus confortables et plus esthétiques. Les 4000, qui constituèrent en leur temps un véritable bond technologique pour le MOB, seront toutes livrées par voie ferroviaire à Zweisimmen, puis acheminées en véhicules jusqu’aux ateliers de Chernex.
D’une longueur de 33,4 m et d’une masse de 60 t, les 4000 sont dotées de réels raffinements, dont une électronique de commande assurant la surveillance des accélérations et décélérations ainsi que la vitesse imposée en freinage, tout en demeurant très représentatives de la technologie de leur époque. Chaque demi-élément est relié électriquement à sa contrepartie, afin d’assurer la continuité de l’alimentation en cas de décollement de l’un des deux pantographes, et est doté en propre d’une commande par contacteurs électropneumatiques et d’un rhéostat alimentant quatre moteurs de traction. En traction, il y a deux couplages (série et parallèle) avec 23 crans, plus quatre crans de shuntage, contre deux systèmes de freinages électriques (rhéostatique avec 26 crans et récupération avec 30 crans) qui feront l’objet en 1992 d’une mise à niveau (excitation séparée par hacheur) sur le modèle de l’ABeh 4/4 II du BOB. La transition série/parallèle s’effectue selon l’effort de traction, entre 18 et 26 km/h, le second couplage étant utilisé pour atteindre la vitesse maximale autorisée (70 km/h). Afin d’améliorer l’adhérence, les rames sont dotées d’origine de sablières et ont reçu, en 1992, des brosses frottant contre les rails. Sous 840 V, les 4000 sont capables de produire 883 kW en régime unihoraire (705 kW en continu) et produisent un effort maximum de 186 kN (72,5 kN à 33,5 km/h en régime continu) contre 157 kN en freinage rhéostatique ou 118 kN en récupération. La plage d’utilisation des deux systèmes est fonction de la tension en ligne et de la vitesse pratiquée, la récupération prévalant pour les allures les plus soutenues. Pour les efforts de retenue élevés, des sabots de frein ainsi que les patins du frein électromagnétique viennent en complément. Les 4000 sont en sus dotées d’un frein d’immobilisation à ressort. Le frein mécanique fonctionne selon le mode suivant. La commande du frein agit sur la conduite du frein pneumatique à vide (1), cette dernière actionnant le frein à vide du train et le frein pneumatique à air comprimé de l’automotrice. La configuration des aménagements intérieurs va évoluer au cours des années.