Le tram stéphanois a été prolongé pour donner naissance à une nouvelle ligne T 3. Le réseau de transport est réorganisé autour de son tramway tandis que le trolleybus fait un retour remarqué.
Peu de réseaux de tramway en Europe peuvent se vanter d’approcher les 140 ans. C’est le cas de Saint-Étienne qui avec Marseille et Lille a conservé ses tramways durant la vague d’éradication. Quand toutes les villes s’empressaient de se débarrasser des trams au nom du progrès, celles-ci ont avancé à contre-courant en pérennisant un mode jugé alors dépassé. Dans cette liste, Saint-Étienne a fait un choix encore plus audacieux. À Lille, seule une ligne suburbaine en site propre a été conservée. Même chose à Marseille où le 68 a été sauvé par le tunnel de 1,5 km entre Noailles et le boulevard Chave. Impossible en raison de son étroitesse de s’y faire croiser deux trolleybus comme cela a pu être envisagé.
Rien de tout ça à Saint-Étienne, si ce n’est un axe nord – sud structurant au très fort trafic de 70 000 voyageurs par jour. La ville a pourtant commencé à partir de 1942 à remplacer ses tramways par des trolleybus. Les différentes lignes ont ainsi été converties jusqu’à ce que vienne le tour du 4, ce tram qui traverse l’agglomération du nord au sud de Bellevue à Terrasse sur 5 km. La ligne s’engage dans un centre-ville étroit, partageant la chaussée avec la circulation automobile. Pour faciliter sa fluidité et accompagner l’augmentation de sa fréquentation, la cohabitation avec le trafic routier est devenue un vrai handicap. Mais le trolleybus, aussi performant soit-il, ne permet pas d’obtenir de meilleurs résultats, bien au contraire. Le choix est donc fait de conserver le tramway, de l’isoler de la circulation quand c’est possible et de le moderniser. Une décision loin d’être évidente en ce milieu des années 50. Partout ailleurs en France, le tramway est présenté comme une solution dépassée et sans aucun avenir.
Pas simple non plus de moderniser une ligne construite en partie au XIXe siècle selon des normes d’un autre âge. Ainsi, le tram de Saint-Étienne cumule les handicaps avec l’absence de sites propres, une voie métrique ou encore un matériel unidirectionnel qui impose la construction de boucles de retournements aux terminus. Mais ce cas n’est pas isolé en Europe et on retrouve des situations identiques à Anvers ou Genève. Première étape de la modernisation, renouveler un matériel roulant datant en partie de… 1907. L’idéal serait de commander des motrices PCC à voie métrique mais aucun constructeur français, malheureusement, n’est en mesure d’en fournir à Saint-Étienne. La commande est donc passée au constructeur belge Brugeoise et Nivelles qui propose un matériel dérivé de celui des réseaux belges, Bruxelles, Anvers ou Gand. Livrées à partir de 1958, ces 30 motrices fabriquées à Strasbourg sous licence marquent le renouveau du tramway français. À tel point que le réseau de Strasbourg, lui aussi à voie métrique et en cours de liquidation, aura interdiction de tester ce matériel sur ses voies, de crainte que la décision de supprimer le tram ne soit remise en cause.
Les PCC permettent de relancer la ligne 4 complétée par un réseau performant de sept lignes de trolleybus. En 1968 est livrée une commande supplémentaire de cinq motrices à deux caisses de 21 m sur 2 m de large pouvant transporter 180 voyageurs. Pourtant, aucune agglomération d’importance ne regarde à cette époque avec intérêt du côté de Saint-Étienne. Il faut dire que la vitesse commerciale de la ligne 4 reste faible en raison de la voirie partagée. Le phénomène s’aggrave à mesure du développement de la circulation automobile dans les années 70.